Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ?

21 novembre 2022

Le jeu en vaut la chandelle. L’expression que j’ai entendue des milliers de fois. Aujourd’hui, ces mots ont un tout autre sens à mon oreille. Moi, la chandelle, je l’ai brulée par les deux bouts avec le jeu. J’écris ces quelques lignes afin de participer, à ma façon à la Semaine nationale de prévention des dépendances. L’ironie là-dedans, c’est que je suis moi-même un dépendant, un « addict ». J’éprouve, encore aujourd’hui, de la difficulté à garder le contrôle sur mes dépendances. Celle que j’aborde, dans ce bref article, est la dépendance aux jeux vidéo. Cependant, il peut s’adapter pour toute autre dépendance en changeant quelques mots-clés.

Selon moi, on sait que l’on est dépendant lorsque l’on organise notre journée de manière à jouer le plus possible. Ce que je veux dire, c’est que l’on se lève le matin et la première chose que l’on a en tête est de jouer. Généralement, on y pense toute la journée. À l’école ou au travail, on imagine et organise déjà le prochain raid ou la prochaine campagne en ligne que l’on pourra entreprendre dès notre retour à la maison. Puis, une fois branché, impossible de décrocher les yeux de l’écran. On saute un souper en famille. On repousse la douche. On combat notre sommeil pour gamer encore quelques heures. Enfin, vient un moment où la fatigue est trop lourde à supporter et que l’on se met au lit, la plupart du temps, au petit matin. Lorsque l’on est « chanceux », le jeu occupe aussi nos rêves. Et ainsi va la danse; le cercle vicieux reprend. Toutes les occasions sont bonnes pour que l’on joue. Cela ne prend que quelques jours et notre cerveau est programmé pour le jeu. Tout comme nos vies.

Souvent, nos proches tentent d’intervenir parce qu’ils sont témoins du cycle sans fin qui nous envahit. Malheureusement, ils n’y peuvent rien. Le jeu est déjà ancré dans notre système. On va leur mentir pour les rassurer, pour calmer leurs craintes. Mais le pire là-dedans, c’est que l’on se ment sans cesse à nous-mêmes. Et ils s’en rendent compte, mais demeurent totalement impuissants. On se ment parce que l’on trouve un certain réconfort dans nos vices. On se sent bien sur le coup. On ne pense à rien d’autre. « Ils ne nous comprennent pas ! » Combien de fois peut-on se répéter cette phrase ? Pourtant, certaines personnes sont capables de comprendre ce que l’on ressent, ce que l’on vit, parce qu’elles ont vécu sensiblement la même chose. Mais on reste là, planté devant l’écran, en faisant semblant que tout va bien et l’on réussit à s’en convaincre.

Tranquillement, on s’isole. On voit moins notre famille, nos amis. On s’absente de nos cours, du travail. On reste de plus en plus seul. On n’entretient plus aucune relation, à l’exception de celles qui nous confortent dans notre nouvelle réalité. On s’entoure alors de personnes qui vivent le même trip. Des gens que l’on ne côtoierait pas normalement, mais dans notre situation, cela reste préférable qu’être seul face à notre conscience. On se met à accepter de faire certaines choses qui vont à l’encontre de nos valeurs. Mais ça n’a aucune importance comparativement à ce que cela nous apporte. Notre besoin devient fondamental, au même titre que de manger et de dormir. Ironiquement, on s’en prive de plus en plus pour jouer. On néglige davantage notre corps, tout comme on évite nos êtres chers.

Puisque je ne possède pas les qualifications nécessaires, je vais m’abstenir d’aborder les causes des dépendances. Je me permets toutefois d’affirmer qu’il s’agit de causes multifactorielles assez complexes et qu’il est toujours possible de les surmonter.

Enfin, il n’y a aucune solution miracle pour s’en sortir. Pour ma part, j’ai décroché de l’écran lorsque j’ai trouvé de l’intérêt ailleurs, dans ma vraie vie : ma famille, mes amis, mes passions, les voyages, mon travail. Toutes ces choses m’ont ramené, d’une certaine façon, à l’essentiel, à ce dont j’avais réellement besoin. Le jeu occupe toujours une place dans ma vie, je joue encore par moments, par simple nostalgie. Ma mère m’a toujours dit que : « dans la vie, tout est une question d’équilibre ». Donc, j’estime que jouer quelques heures par semaine est totalement sain puisque cela n’entraîne aucune conséquence négative sur mon quotidien. Bien que je sois conscient de jouer avec le feu, gamer raisonnablement me permet de me détendre.  Toutefois, comme n’importe qui, je ne suis pas à l’abri d’une rechute. Désormais, je sais reconnaitre mes patterns et je suis conscient de tout le cheminement accompli. Mon entourage sait comment agir s’ils assistent à l’une de mes rechutes et ça m’aide beaucoup. C’est difficile d’accepter d’être vulnérable, d’ouvrir notre âme et d’afficher nos défauts à notre entourage. Mais il suffit de trouver la bonne oreille : celle qui entend et qui écoute sans jugement, sans critique. Il n’y a rien de pire qu’un discours moralisateur pour aborder une dépendance. S’orienter vers les bonnes personnes lorsque cela est nécessaire, ça permet de se sentir moins seul dans notre éternel combat avec soi-même.

Sur ce,

Je suis tout ouïe.

Sam