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Lettre au Petit Prince

20 janvier 2025

Cher Petit Prince,

J’espère que cette lettre te parviendra, malgré ta maison spatiale. Récemment, j’ai dû lire tes mémoires pour mon cours de français. Je n’aime pas lire, ce n’est pas dans mes habitudes. Cependant, pour ton histoire, j’ai dû faire une exception, car, pour être honnête, tes aventures m’ont beaucoup fasciné.

Quand mon enseignante m’a prêté ton livre, j’ai dû hausser un sourcil. Un récit d’enfant ? En 5e secondaire ? Je pensais qu’elle nous croyait encore bébés.

Alors, comme toi, pour lire ce livre, j’ai dû sortir de ma petite planète afin de « grandir ». Je trouve qu’il y a beaucoup de leçons dans tes aventures. Par exemple, ton fiasco avec les baobabs nous apprend qu’il faut régler nos problèmes le plus tôt possible, avant qu’ils ne deviennent trop gros pour être résolus. Ou encore, l’histoire du buveur qui démontre que l’on peut fuir nos troubles en buvant, mais l’on ne fait que cacher les déchets sous le lit.

Parmi toutes les leçons transmises dans ton récit, ma préférée est celle du renard : « On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux. » L’amour et l’amitié sont invisibles. Ce n’est que lors de leur absence que nous ressentons leur présence.

Mes sœurs adorent le ballon-balai. Elles participent à des tournois de temps en temps et quittent la maison pour s’y rendre. Je n’y pense pas beaucoup au début. Mais je réalise vite qu’elles ne sont plus là, car je n’entends plus le rire distinct de mes hyènes. Pourtant, je me rends compte qu’elles sont là, dans mon cœur, quand je me prépare pour aller à l’école, quand je fais un casse-tête, quand je complète un devoir. Il existe sûrement des milliers de femmes autochtones semblables à elles, mais je m’en moque. Elles sont uniques pour moi et rien ne peut les remplacer.

C’est comme toi avec ta rose. Quand ton renard t’a suggéré de visiter un champ de roses, tu as réalisé qu’elle est irremplaçable, car tu l’as apprivoisée. Les autres roses n’ont pas reçu ton apprivoisement.

Dans mon enfance, j’ai appris que l’espace est vide, dépourvu de vie et de son. Ça doit aller mieux maintenant, avec ton mouton : tu ne seras plus seul là-bas. Ça doit être une bonne relève contre les baobabs. C’est grand, chez nous, assez grand pour accueillir six types de baobabs.

Bref, continue d’éclairer le ciel nocturne, car je crois fortement que tu peux inspirer un grand nombre de personnes.

Avec tout mon respect,
Elias